Plainte contre Kabila: la saga continue



Après le dépôt devant la Cour constitutionnelle, le 7 mai, d’une plainte contre l’ex-président Joseph Kabila pour 10 cas d’assassinat et de massacre commis sous son règne, la machine politique kabiliste s’est mise en route pour défendre son « autorité morale », alors que la plateforme de la société civile ayant déposé la plainte, Eveil Patriotique, a annoncé lundi par la voix de son vice-président, Jean-Claude Katende, le début de l’enregistrement des victimes dans les dix dossiers.
 
Après les premières escarmouches, qui avaient donné à l’affaire le tour d’un vaudeville, les « politiques » donnent de la voix. L’une d’entre elles est celle d’Honoré Kazadi Ngube Ngube, qui fut un des micro-candidats à la présidentielle de décembre 2018, avant de fonder un regroupement de micro-partis politiques appelé « Opposition républicaine » (sans préciser s’il s’oppose au chef de l’Etat, Félix Tshisekedi, ou aux kabilistes qui dominent le pouvoir législatif, conformément au partage du pouvoir entre Kabila et Tshisekedi, en dépit des résultats électoraux, jamais publiés en détail). Ce politicien, qui est aussi évêque d’une église évangélique, a attaqué la plainte contre Kabila par « Mukuna le sataniste », plainte qui, selon lui, « attise le feu pour mettre le pays dans le chaos. Le cercle politique de Joseph Kabila ne va pas tolérer de telles bêtises ».
 
L’évêque Kazadi Ngube Ngube s’était fait remarquer, le 4 avril dernier, en annonçant – en tant que « Katangais d’origine pure » – qu’une plainte serait déposée contre Félix Tshisekedi pour un « génocide » commis par son « armée tribale ». L’orateur, qui avait largement diffusé sa déclaration sur les réseaux sociaux, visait par ces mots la répression, le 28 mars dernier, par l’armée et la police au Katanga, d’attaques concertées, contre plusieurs villes katangaises, par des miliciens Bakata Katanga (séparatistes) du grand bandit Gédéon Kyungu, condamné à mort en 2009 pour crimes contre l’humanité, évadé en 2011 et réhabilité par Kabila en 2016.
 
Ces derniers, porteurs d’armes blanches et de quelques armes modernes – et largement craints en raison de nombreuses exactions passées – avaient laissé une quarantaine de morts dans cette répression. Kazadi Ngube Ngube assure qu’ils n’avaient « commis aucune infraction sauf être Katangais ».
 
Des personnes avaient été arrêtées, à la suite de ces attaques concertées, dont des femmes, qui avaient été incarcérées nues avec des enfants et des hommes – des images qui avaient choqué et dans lesquelles Honoré Kazadi Ngube Ngube dénonçait un « crime contre l’humanité ».
 
La loi sur les anciens Présidents
 
Mais l’évêque évangélique katangais n’est pas le seul à condamner le dépôt de plainte contre Joseph Kabila. Ainsi l’aile dissidente pro-Kabila du parti AFDC-A de Modeste Bahati a invité la justice à sanctionner « sévèrement » Pascal Mukuna, auteur de la plainte, pour avoir tenu des « propos injurieux et diffamatoires » contre l’ancien Président.
 
Un des membres de cette aile dissidente, Jean-Pierre Tshimanga, député de Tshikapa (Kasaï, ex-Kasaï occidental), a rappelé que si l’article 164 de la Constitution faisait bien de la Cour Constitutionnelle le juge pénal du Président de la République pour des infractions  « commises dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions », la loi du 26 juillet 2018 – votée alors que Joseph Kabila voyait arriver son départ inéluctable de la Présidence, qu’il occupait, en dépit des limites constitutionnelles, depuis 2001 – le met à l’abri.
 
En effet, l’article 7 de cette loi donne à « tout ancien Président de la République élu (…) l’immunité des poursuites pénales pour les actes posés dans l’exercice de ses fonctions » et l’article 8 précise que, pour ceux exercés hors de ses fonctions, il faut « une majorité des deux tiers des membres des deux chambres » pour le poursuivre en justice. En 2018, la Cour constitutionnelle, pro-Kabila, n’avait pas jugé cette loi contraire à l’article 164 de la Constitution.
 
Juridiction internationale
 
On peut ajouter que l’article 9 de cette loi précise: « En matière de crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité commis par tout ancien Président de la République élu, les juridictions nationales ont priorité sur toute juridiction internationale ou étrangère ».
 
Rappelons que la Cour pénale internationale (CPI) est notamment compétente pour une affaire qui lui est envoyée par un Etat membre (article 14 de ses statuts) ou si son procureur se saisit lui-même (article 15). Une telle plainte est recevable (article 17) si l’Etat où les crimes présumés sont survenus  n’a « pas la volonté » ou est « dans l’incapacité de mener véritablement à bien l’anquête ou des poursuites ».


La Libre Afrique 

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